par Catherine Faucher, agr.
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15 avril 2025
La tache goudronneuse du maïs a été observée pour la première fois il y a plus d’un siècle au Mexique. Bien que ce soit une maladie plutôt répandue dans ce pays et en Amérique centrale, les États-Unis et le Canada étaient épargnés jusqu’à récemment. Ce n’est qu’en 2020 que les premiers cas furent observés au Canada, et ici au Québec, quelques cas ont été confirmés par le MAPAQ l’automne dernier, dans le Centre du Québec, mais on en a aussi trouvé à Saint-Césaire et Saint-Rémi, en Montérégie. En 2018, la tache goudronneuse devenait une préoccupation économique pour la production du maïs dans le Mid-Ouest, alors que des essais universitaires révélaient des pertes possible de rendement de l’ordre de 39 bo/ac (2.5 tm/ha) lorsque la pression de la maladie est sévère. C’est d’ailleurs à cause de ce fort potentiel de dommage que son arrivée au Québec fait autant jaser ; vous n’avez certainement pas fini d’en entendre parler ! La tache goudronneuse est causée par le champignon Phyllachora maydis. Celui-ci produit des spores en période de forte humidité, qui sont transportées par le vent et étendent ainsi les zones et les régions affectées. P. maydis s’installe et croît sur les feuilles, créant des fructifications de forme circulaire et de couleur goudron . L’infection nuit à la photosynthèse, réduit le mouvement de l’eau et des nutriments, ce qui a un impact direct sur le rendement et la qualité du grain, surtout lorsqu’elle se produit tôt en saison et cause une sénescence prématurée des tissus. Ce n’est pas une maladie de l’épi, et la tache goudronneuse n’est pas responsable de la présence de toxines dans les grains. Comme c’est le cas avec toutes les maladies, une fois l’hôte et l’agent pathogène présents, il faut encore que les conditions climatiques soient propices à son développement pour que la maladie survienne. La tache goudronneuse se développe lorsque les températures sont fraîches (15-20°C), l’humidité relative élevée (>75%) et que le feuillage demeure humide pour au minimum 7 heures. D’ailleurs, l’infection se développe généralement sur le dessus de la courbure de la feuille en premier, là où la rosée demeure plus longtemps. C’est une maladie polycyclique, c’est-à-dire qu’elle peut compléter plusieurs cycles de vie durant une saison de croissance. Après l’infection, une fructification se développe en 12 à 15 jours et peut produire des spores peu de temps après. La propagation à tout le plant, et d’une zone à l’autre d’un champ peut donc être très rapide. Les spores survivent à l’hiver sur les résidus de culture. Dans un champ nouvellement infecté, les symptômes apparaissent souvent sur les feuilles supérieures en premier, mais lorsque l’infection est initiée par le pathogène déjà présent sur les résidus, ce sont les feuilles du bas et jusqu’au spathes qui sont attaquées. Malheureusement, il n’existe actuellement aucun hybride qui offre une résistance complète à la tache goudronneuse. Certains hybrides semblent par contre être plus tolérants que d’autres à la maladie. Les chercheurs travaillent activement à l’identification et à l’incorporation de gènes de résistance, mais c’est un processus long et complexe en raison de la biologie unique de la tache goudronneuse. En attendant, certaines pratiques culturales, telles que la rotation des cultures et le travail du sol pour enfouir les résidus infectés peuvent aider. Une population élevée, lorsque l’hybride est sensible et le pathogène présent, peut intensifier l’incidence de la maladie en créant un environnement plus humide. Finalement, l’utilisation de fongicides permet de limiter les dommages causés par la tache goudronneuse. Généralement, le traitement doit être effectué entre les stades VT et R2. Dans les régions où la pression de la maladie est élevée, certains agriculteurs explorent même l’option d’applications multiples. Bien que cette approche augmente les coûts, elle peut être nécessaire pour protéger les champs à haut potentiel de rendement. Si l’utilisation d’un fongicide est envisagée, assurez-vous que les conditions d’application permettront une efficacité maximale : buses, volume d’eau, vitesse d’avancement et pression, mais surtout, l’ajout d’un adjuvant, comme le MasterLock®, pour permettre au produit de pénétrer dans la canopée et de bien couvrir tout le feuillage. À retenir pour 2025 : on reste à l’affût et on visite les champs de maïs à partir du stade V8, surtout si les conditions sont propices au développement de la maladie, et en particulier si vous cultivez près des foyers d’infection découverts l’automne dernier !